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III

sa naïveté. Dumarsais, qui allait chercher ses tropes à la halle, en eût trouvé de plus poétiques encore, s’il les avait poursuivis jusque dans les récits légendaires des campagnes.

La faculté de bien conter les légendes est un don qui n’appartient pas précisément aux plus spirituels, mais aux plus impressionnables et aux mieux doués du côté de la mémoire. C’est ordinairement chez des femmes de la campagne que cette aptitude se développe le mieux. Dans leur préface, les frères Grimm en décrivent un type remarquable :

« Nous avons eu le bonheur de connaître, au village de Niederzwehrn, près Cassel, une paysanne à laquelle nous devons les plus beaux contes de notre second volume. C’était la femme d’un petit éleveur de bestiaux : elle était pleine encore de vigueur et n’avait guère plus de cinquante ans. Ses traits avaient quelque chose de net et d’arrêté, avec une expression agréable et intelligente ; ses grands yeux étaient clairs et perçants. Elle gardait parfaitement dans sa mémoire toutes les anciennes légendes, en avouant que cette faculté n’était pas donnée à tout le monde et que beaucoup de gens ne pouvaient pas les retenir. Elle les racontait posément, sans hésitation, avec une animation extraordinaire ; on voyait qu’elle y prenait un plaisir extrême ; quand on le lui demandait, elle répétait ses récits assez lentement pour qu’on pût les recueillir sous sa dictée. Plusieurs de nos contes ont été