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LES LORTIE

— De quoi vivrons-nous ?

— Nous travaillons ici ! Nous pourrons bien travailler là-bas aussi. Seulement je te garantis que je ne m’en irai pas sans avoir fait payer à quelques-uns la misère qu’on nous fait actuellement. À commencer par Sénécal ! Celui-là, je te jure qu’il ne l’emportera pas en paradis.

Une fois encore la sonnerie du téléphone retentit. Ninette se dirigea vers l’appareil, mais Marcel fut plus prompt qu’elle :

— Allô !

Ninette vit ses lèvres trembler, sa main se crisper sur le récepteur. Rageur, il raccrocha.

— Les crapules ! murmura-t-il. Je suppose que c’est un mauvais numéro dans ce genre-là que tu as eu ce matin ?

— Oui, répondit-elle, ce matin, et deux hier soir.

— Tu vois bien qu’il faut qu’on fiche le camp !

Jamais ils ne nous laisseront tranquilles ! Jamais !

— Ils finiront bien par se fatiguer.

— Oui, mais moi je serai devenu fou avant !

***

Quand, une demi-heure plus tard, Marcel arriva chez monsieur Bernard, il le trouva en grande conversation avec madame Messier, sa femme de ménage. La brave femme était violette d’indignation. L’aimable vieillard était calme et soucieux.

— Vous savez, cria Madame Messier à Marcel dès qu’elle l’aperçut, on a une autre vitre de cassée à matin ! Si c’est pas malheureux tout de même ! Je vous dis que si je mets la main sur le p’tit vaurien qui s’amuse à faire ça, j’vas le lui faire regretter pas pour rire !

— Comme ça, dit Marcel, ça continue, monsieur Bernard ?