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MOTTE-AIGRON.

soupçon de pharmacie. Non content de ce début, il nous apprend dans le corps du livre[a] que son bisaïeul, ayant accompagné Henri II au voyage d’Allemagne, fut un des premiers capitaines que ce roi laissa dans Metz, et un de ceux qui défendirent le plus courageusement cette place contre Charles-Quint. Il ajoute que sa bisaïeule, Catherine de la Barde, était d’une maison aussi noble qu’aucune autre du pays, et que son grand-oncle du côté maternel eut l’honneur d’être secrétaire des commandemens, et principal ministre de Marguerite, femme de Henri d’Albret, roi de Navarre. Le père Goulu avait déjà changé de style, puisqu’avant la publication de cet ouvrage il avait dit que le sieur de la Motte-Aigron était trop honnête gentilhomme pour dénier, etc.[b]. Examinera qui voudra si cela est équivalent à une bonne rétractation : je ne le crois pas ; et j’ai ouï dire qu’il était vrai que le père du sieur de la Motte-Aigron avait été apothicaire, mais qu’il releva sa condition en achetant l’office d’élu, et qu’enfin il fut maire de Cognac en Angoumois. M. de Malleville en a touché quelque chose dans une épigramme qui n’a point été insérée au recueil de ses poésies (B). Je n’ai pu déterrer ce que devint notre auteur (C), après la publication de sa réponse, en 1628, ni ce que devint le dessein qu’il semblait avoir de rétablir, dès qu’il aurait terrassé le général des feuillans, les fruits de ses veilles que le feu lui avait ruinés : c’étaient des travaux qui concernaient l’histoire d’Espagne, et quelques autres matières[c]. C’est à ceux qui composeront la Bibliothéque d’Angoumois à nous l’apprendre.

J’ai vu depuis quelques jours un livre, où l’on assure que la peine que la Motte-Aigron se donna d’écrire contre Phyllarque, et en faveur de Balzac, fut une semence de haine entre lui et ce dernier, parce que Balzac voulait que l’on crût qu’il était l’auteur véritable de l’ouvrage qui paraîtrait sous le nom de la Motte-Aigron (D).

  1. Pag. 306, 307.
  2. Préface de la IIe. partie des lettres de Phylarque.
  3. Voyez son épître dédicatoire.

(A) Conjointement avec M. de Vaugelas. ] Le père Goulu, dans la préface de la IIe. partie de ses lettres, dit que celui qui accompagnait la MotteAigron était le prieur de Chives ; (il y a des lettres à ce prieur parmi celles de Balzac) mais la Motte-Aigron nous apprend[1] que celui, avec lequel il alla voir le père Goulu, était M. de Vaugelas.

(B) Malleville.…. dans une épigramme qui n’a point été insérée au recueil de ses poésies. ] Sorel, ayant remarqué que la Motte-Aigron, pour montrer où le mal le tenait à ceux qui y entendaient quelque chose, et pour donner une grande opinion de sa race, dédia son livre à son père, par une épître latine avec de hautes qualités, ajoute ces paroles : S’il nous était permis ici, nous dirions l’épigramme que le sieur de Malleville fit sur ce sujet ; mais de certains officiers de France y étant intéressés, nous sommes dans une conjoncture où ce serait insulter à leurs malheurs[2]. Pour moi qui ne sais point quelle peut être cette conjoncture, et qui en tout cas la crois tout-

  1. Réponse à Phyllarque, pag. 299.
  2. Bibliothéque française, pag. 132 de la seconde édition.