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WILHEM.

y trouvant un crime exécrable de l’archevêque de Cologne.

(G) J’ajouterai quelque chose... touchant l’erreur... du Supplément de Moréri. ] Cette addition me sera fournie par Florimond de Rémond. Il dit que Théodore de Bèze, non content d’avoir employé en prose cette allusion à Judas, a voulu aussi l’exprimer en sa rithme :

Voy d’un autre costé le malheureux Groper,
Qui son seigneur trompant, son cœur laisse attraper,
Estranglé d’un cordon d’un chapeau detestable.
De la grace divine Herman est le tesmoing
A celuy qui du ciel plus que du monde a soing,
Groper monstre de Dieu la vengeance effroyable.


« Un pauvre sot, ajoute-t-il, prenant au pied de la lettre les mots de Bèze me vouloit faire à croire, que Groper avoit filé un licol du cordon de son chapeau, et s’estoit estranglé de ses mains : au lieu que Beze veut dire, l’appetit d’un chappeau lui avoit osté la voix qu’il vouloit employer pour la defense du lutheranisme [1]. » Qui aurait pu s’imaginer qu’une métaphore aussi intelligible que celle-là ferait naître des pensées si fausses et si ridicules ?

  1. Flor. de Rémond, Histoire de l’Hérésie, liv. III, chap. IX, num. 4, pag. 321.

WILHEM (David le-Leu de), conseiller au conseil des princes d’Orange, et à celui de Brabant, mérite d’être compté parmi les hommes illustres du XVIIe. siècle. Il était issu d’une très-noble et très-ancienne famille (A), et il naquit à Hambourg le 15 de mai 1588, Sa mère, qui joignait à la noblesse du sang (B) beaucoup de piété et beaucoup de zèle pour la religion protestante, le fit très-bien élever, et l’envoya étudier à Stade dès l’âge de dix ans, sous de fort bons maîtres : et après qu’il eut profité à Hanau des leçons de Jean-George. Crobius, et de Jean Rodolphe Lavatérus, elle le mena à l’académie de Franeker. Il y demeura trois ans, et en partit l’an 1611, pour aller voir celle de Leyde, où il fit de grands progrès en philosophie, en jurisprudence ; dans les langues orientales, etc. ; après quoi il alla en France, et s’arrêta quelque ternps à l’académie de Saumur ; et puis, l’an 1613, il alla loger à Thouars chez le docte André Rivet, dont il se fit estimer d’une façon très-particulière (C), entre autres choses par les connaissances qu’il avait acquises en théologie. Il se perfectionna beaucoup dans le Levant par les voyages qu’il fit au grand Caire, à Jérusalem, à Alexandrie, etc., les années 1617, 1618 et 1619. Il eut une grande familiarité avec Cyrille de Lucar, et il conféra souvent avec lui sur les différens de l’église grecque et de l’église latine. Il reçut plusieurs lettres de ce fameux patriarche [a], qui méritent de voir le jour, et que ses héritiers promettent de publier pour satisfaire la curiosité des savans. Après qu’il fut de retour de ce grand voyage, il s’arrêta quelques années à Amsterdam avec son frère (D) ; mais la forte envie d’une connaissance plus parfaite des langues orientales, et l’inclination qu’il avait pour le Levant, l’engagèrent à y faire un second voyage, l’an 1625. Il est sûr qu’il fit ces voyages en habile homme, c’est-à-dire en faisant de belles et de curieuses observations, et en acquérant une grande connaissance de l’arabe, du persan et du chaldaïque [b]. Il

  1. Voyez la remarque (E).
  2. Outre les langues mortes des nations savantes qu’il entendait parfaitement, il