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SUR LE PRÉTENDU JUGEMENT DU PUBLIC.

Personne n’ignore que c’est aussi la raison des Ottomans. Quel mal y a-t-il à comparer par ce côté-là un prince juif avec des monarques infidèles, sectateurs de Mahomet ; un prince, dis-je, qui n’avait pas encore cette sagesse que Dieu lui donna depuis ? L’auteur ferait-il difficulté de dire que Salomon prit plusieurs femmes, par un faste assez semblable à celui des rois païens et des sultans ? Notez sa supercherie. Il savait que le terme d’Ottomans ne frapperait point la populace, mais qu’elle serait alarmée par le mot Turc. C’est pourquoi, au lieu de rapporter, mes paroles, il les a métamorphosées en celles-ci, une politique à la turque, qu’il a citées en italique. Voilà son péché d’habitude : tout-artifice lui plaît, pourvu qu’il lui serve à tromper les ignorans. Mais que dirait-il contre tant d’auteurs qui assurent que Salomon fut idolâtre personnellement, et qui doutent de son salut ? C’est bien pis que de comparer pour une fois sa politique à celle des Turcs.

XXII. Il m’accuse d’avoir maltraité Caméron et M. Daillé. Oserait-il dire cela, s’il avait jeté les yeux sur mon Dictionnaire ? N’y eût-il pas vu que Dumoulin, son aïeul, et les Œuvres de Rivet, beau-frère de Dumoulin, m’ont fourni ce que j’ai dit au désavantage de Caméron ? N’y eût-il pas vu que je cite M. des Marets, pasteur et professeur en théologie à Groninques pour ce qui concerne M. Daillé, et que je déclare nettement que je ne prononce rien sur le fait ? Il y a bien des gens qui ne savent pas encore la différence qui se trouve entre un historien et un élogiste. Faisons une petite revue de l’imprimé, afin de marquer une partie des faussetés de fait qui s’y rencontrent ; car pour celles de droit il serait très-inutile de les indiquer. Ce sont des reproches vagues : mes adversaires disent oui, je dis non, nous voilà tant à tant : nous ne sortirons de cet équilibre que par l’examen particulier de chaque proposition qui leur déplaira. Ils me trouveront toujours prêt à les satisfaire. J’en donnerai même un petit essai dans les réflexions XXVIII et XXXII.

XXIII. Il y a quelques faussetés de fait dans le Jugement de M. l’abbé Renaudot : je ne les indique point, car j’ignore si elles viennent de lui ou des copistes. Outre que chaque lecteur se peut convaincre sans peine qu’il est très-faux que je donne plus d’éloges à M. Abelli qu’à MM. de Saint-Cyran et Arnauld ; ni que je loue les traités de controverse du père Maimbourg, plus que ceux de M. Nicolle ; ni que je noircisse celui-ci, comme ayant écrit des points de doctrine qu’il ne croyait pas. Comment l’aurais-je noirci de ce côté-là, puisque je pose formellement que si son silence a pu être attribué à un tel principe, il a pu aussi être allié avec la persuasion ? Je laisse au jugement des lecteurs quelques autres faussetés de même nature.

XXIV. Le commentaire sur le Jugement de cet abbé contient entre autres mensonges celui-ci, que la guerre a été cause que