Page:Bazin - La Barrière, Calmann-Lévy.djvu/101

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Un vent du sud-ouest passait en fleuve rapide et d’un mouvement égal au-dessus de la Grande-Bretagne. Il n’avait de remous que tout en bas, là où il se brisait aux collines, aux maisons, et courbait les arbres, les petits tout entiers et la pointe des plus vieux. Toutes les feuilles baignaient et bruissaient dans son courant. Un nuage dont on ne voyait pas la fin, uniforme, épais, noir, tendait les deux tiers du ciel, tandis que l’orient avait encore quelques étoiles, pâles dans le bord du vent. Le nuage, qui couvrait plusieurs comtés du royaume, emportait la fumée de centaines et de centaines de villes et de villages ; il était lourd de poussière, de débris, de misère humaine, de tous les miasmes vomis par les rues ; mais bientôt il flotterait au-dessus de l’Océan Glacial, et il serait, perdu dans l’immensité des lames froides, aussi négligeable qu’une fumée de pipe tordue au coin de la bouche d’un matelot. Marie le regardait ; elle songeait aux confidences de Réginald, au drame dont elle avait entendu parler à mots couverts. Madame Limerel lui demanda :

— Cette longue promenade avec Réginald