Page:Bazin - La Barrière, Calmann-Lévy.djvu/234

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

hauteur, au-dessus de Paris, il entendrait l’inégal grondement de la ville, comme une chanson de la mer, et cette imagination n’avait pas été sans influence sur sa détermination de passer la nuit à Montmartre. Il fut déçu. Au lieu de la rumeur des marées, qui s’enfle et qui décroît, c’était autour de lui un silence absolu, tout à coup déchiré par les sifflets des locomotives de la gare du Nord. Engourdi par la fatigue, Réginald croyait être en voyage, couché dans les huniers d’un navire, et c’étaient les commandements des officiers qui se croisaient tout en bas sur le pont. Parfois, une chaise tremblotait dans la cellule ; ou bien le petit miroir pendu près du lit oscillait au bout de la ficelle et égratignait la cloison ; un mugissement sourd et bref se levait des profondeurs de l’océan, sans qu’on pût deviner où déferlait la vague monstrueuse qu’il avait vomie, à gauche, à droite, en avant. Et l’autre appel, là-bas, si loin, désespéré, n’était-ce pas la sirène d’un navire dans les brumes ? Puis tout s’apaisait. L’idée de la mer s’évanouissait dans le sommeil. Le vent glissait sur les pierres. Les millions d’hommes, veillant ou endormis autour de