Page:Bazin - La Barrière, Calmann-Lévy.djvu/43

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t’aime, est-ce que… est-ce que tu l’épouserais ?

La jeune fille se leva. Elle était délicieuse d’émotion et de jeune gravité, de trouble avoué et combattu tout ensemble. Elle imaginait celle scène, elle entendait les mots de tendresse, et elle voyait le visage mince, étrangement inquiet, de l’homme qui les disait. Mais une puissance souveraine luttait contre ces apparences. Quelque chose de très fort, de très subtil, de très noble, disait d’autres mots, et dans l’âme jeune allait encore plus avant. Marie répondit :

— Il y aurait une question bien grave entre nous.

La mère fit un signe d’assentiment. Elle devait avoir une confiance entière dans la droiture et l’énergie de cette fille de vingt ans ; elle devait être de celles à qui peu de paroles suffisent, parce qu’une longue habitude de penser en commun les explique et les garantit, car elle ne chercha pas à interroger au delà. Elle dit simplement :

— Eux et nous, est-ce bien une famille que nous formons ? Nous nous recevons, nous dînons les uns chez les autres, mais nous ne nous