Page:Beaumarchais - Œuvres complètes, Laplace, 1876.djvu/835

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

LES DÉPUTÉS DE LA HALLE

ET DU GROS-CAILLOU

SCÈNE DE POISSARDES ET DE MAÎTRES PÊCHEUX 1

PERSONNAGES.

LA MÈRE FANCHETTE.

LA MÈRE CHAPLU.

PERSONNAGES.

CADET HEUSTACHE.

JÉRÔME.

LA MÈRE FANCHETTE, à Cadet Heustache qui veut entrer le premier.

Hé ! mais vraiment, c’te pauvre petite bête, donne-l’y à faire, il l’a ben gagné. Encore un coup. Cadet, j’te le dis, qu’tu n’entreras pas t’aantnous : et qu’la mèr’ Fanchette qu’est moi, z’et la commère Cliaplu que v’ià n’auront z’en vertu d’Dieu pas fait six bonn’s lieues, sans r’proche, et n’seront pas venues tout z’exprès d’ia halle pour qu’un fichu mareigner d’eau douce comme toi lieu passe d’sus l’corps d’vant la présence d’honnête compagnie, entends tu, bouffi ? CADET. Si j’entendons ? Ah ! que d’reste. Pardi , tu brailles assez fort pour ça ; et on voit ben qu’tu comptes souper en ville, car t’a mis ta belle gueule ; mais, moi, j’te dis et j’te douze, c’est vingt-deux : que si tu viens de la halle avec ta marchandise, j’venons du Gros-Caillou avec la nôtre ; c’est z’encore plus loin, et qu’eu dépil d’Ia différence d’not’ civilité à l’endroit du biau sesque, j’entrerons d’vant vous, et à votre barbe encore ; liens, commère, fiche-toi bien dans la tête, une bonne fois pour tout, qu’jamais fille ni femme, fût-elle plus belle qu’la mère à Curpidon, n’a fait z’et ne fera jamais rester Cadet à la porte nulle part. JÉRÔME. Ni Jérôme non plus, vante-t’en z’en et du bon vent ; va, tuas raison, Cadet, d’soutenir l’honueur de not’ sec. LA MÈRE FANCHETTE. Hé ! j’nous fichons d’vot’ sec comme d’vot’ mouillé. i. Cette scène est en effet du plus pur poissard, et Vadé u’a pas fait mieux. Beaumarchais, comme dans les petites pièces précédentes, n’a pas épargné les couplets. Les airs notés doivent être de lui. On erra en effet, par une lettre à M<nc Panckoucke, qui viendra plus loin, qu’il s’amusait, dans sa jeunesse, à mettre en mnsiqoe des scènes ■ hautes en couleur *, qu’il accompagnait lui-même sur la harpe. Ed. F. JÉRÔME, lui prenant lu main. Mai-, sarpédié, la mère Fanchelte, faut raisonner une fois raison, et... LA MÈRE FANCHETTE, le repoussant. N’ous magne pas tant, hé ! monsieur Jérôme ! ça nous amollit. CADET. Bon. Hé ! d’queu chienne d’nature est donc ta pian ? nous, j’sommes tout au rebours : apparemment sans doute que c’est l’air du Gros-Caillou qui cause cela. LA MÈRE CHAPLU. Quoi qu’ça t’ fait à toi, commère ? lai-- - 5 entrer, pique c’est l’entêtement d’iieu obstination ; au bout de tout, n’suis-je t’y pas venue enseml ment àl’occasion du sujet d’Ia bonne fête de ce brave seigneur ? quoi qui pensera d’nous si j ’allons nous chanter penille d’vant ly comme des gcjis d’Ia lie du peuple, au lieu d’iy débargouiller c’te belle z’arangue qu’javons tant z’eu de peine z’à ficher dans la cervelle d’not’ tète ? JÉRÔME. Ah ! sacré nom pas d’un chien ! la mère Chaplu ; liens, tu raisonnes comme une peinture, et l’a pu d’esprit qu’un Colombat doré sur tranche. LA MÈRE CHAPLU. C’est vrai, ail’ s’élève tout d’un coup de d’mème qu’une soupe au lait. Et ne te souviens-tu pas de c’que te disait ta pauvre tante Saumon : qu’une femme, au lieur de se fâcher, avait toujours plus d’acquêt d’prendre les choses eu douceur ? CADET. Elle avait raison, la bonne mère, et j’sons éloti z’assez dans l’usage dec’t'habitude-là, nous autres. LA MÈRE FANCHETTE. Et Jésus ! bonne Vierge ! Madame, d’Ia douceur à la façon de ta manière, semble, avis qu’Ut ne serais venue z’ici qu’pour prendre leu parti, à ces hommes.