Page:Beaumarchais - Œuvres complètes, Laplace, 1876.djvu/693

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ou l’on faisait pénitence d’avoir dansé, car je n’entendis parler de personne.

Quatre mois s’écoulèrent dans un profond sommeil, où nous serions restés, si je n’eusse été réveillé (le 1er  juin 1777) par une visite au sujet du Barbier de Séville, qu’on avait en vain demandé plusieurs fois à la Comédie sans pouvoir l’obtenir. J’avais en effet remarqué que depuis neuf mois, c’est-à-dire depuis l’époque où mes demandes d’un compte exact avaient frappé l’oreille des comédiens, on n’avait plus donné ma pièce. Reprenant donc la plume avec un peu de chaleur, je dépêchai (le 2 juin) la lettre suivante à la Comédie :

« Si la patience est une vertu, il ne tient qu’à « vous, messieurs, de nie trouver le plus vertueux ii des hommes. Mais si vous en prenez droit d’oublier que vous me devez depuis deux ou trois ■< ans un compte certifié véritable ; que je vous l’ai « demandé bien des fois verbalement et par écrit ; « qu’après beaucoup d’échappatoires vous avez dû « me l’envoyer le 20 janvier dernier ; que, sur de « nouvelles représentations de ma part, vous vous « êtes excusés, le 14 février dernier, sur les fatigués ou les plaisirs du carnaval, de ne vous « être pas mis en règle à cet égard ; que le carême, le temps de Pâques, celui de la Pentecôte, se » sont écoulés sans que j’aie eu nouvelle de cet ■ imprésentable compte, et que nous ne sommes « pas plus avancés en juin 1777 qu’en janvier 177(i, « vous conviendrez, messieurs, que c’est me traiter un peu légèrement, et qu’il ne tiendrait qu’à « moi d’en être offensé : car il y a des bornes à la « patience même la plus absurde.

« D’autre part, je sais que toutes les fois qu’on « propose à vos assemblées de jouer quelqu’un « de mes ouvrages, la réponse de vos sages est « qu’on ne peut eu jouer aucun, parce que vins « êtes en dispute avec l’auteur. — Eu dispute, ic messieurs ! est-ce vous disputer quelque chose » que d’user les mois et les années à vous prier « de faire justice ? et votre compagnie a-t-elle, il entre autres beaux privilèges, celui de refuser ii constamment d’ouvrir un compte avec ses bénins associés ? Je l’ai vainement cherche dans ii ims règlements.

« Hier encore, M. le président de F***, qui permet qu’on le cite, est venu me dire que beaucoup « de dames étrangères l’avaient prié de demander ■ le barbier de Séville à la Comédie, en payant « les loges prescrites par les règlements ; mais « qu’on l’avait constamment refusé sous plusieurs « prétextes, et que la dernière réponse des coinôdiens avait été que cela ne dépendait pas d’eux, « mais de l’auteur uniquement.

« Vous savez, messieurs, que je ne me suis » jamais opposé qu’on donuàL ce léger ouvrage ; I’qu’on a même usé de mon consentement acquis ii dans des occasions très-dangereuses pour la ii pièce ; ri que j’ai reçu plus d’une fois de la Con médie les remerciments de mon excessive complaisance a ce sujet.

« J’ai donc promis à M. le président de F*** que i< j’aurais l’honneur de vous écrire, cl je le fais… « le plus poliment qui’je puis : car je trouve assez « étrange la maxime adoptée de cesser de jouer » un ouvrage aussitôt que l’auteur parle de « compter.

» Enfin, messieurs, vous donnerez la pièce ou « vous ne la donnerez pas ; ce n’est pas décela « qu’il s’agit aujourd’hui : ce qui m’importe csl de <i fixer un terme à tant d’incertitudes. Convenons ii donc, : —i vous l’acceptez, que je recevrai sous huit » jours de votre comptable (et imti de votre conseil absolument étranger à cet objet) un compte « certifié que vous me retenez depuis si longtemps ; « et que, ce terme expiré, je pourrai regarder votre « silence comme un refus obstiné de me faire juslice. Alors ne trouvez pas mauvais que, faisant u un pieux usage de mes droits d’auteur, je conlic i. les intérêts des pauvres à des personnes que leur /rie il leur ministère obligeront de discuter ces . intérêts plus méthodiquement que moi, qui fais .1 vœu d’être toujours, avec le plus grand amour .. pour la paix,

« Votre, etc. »

La Comédie, réveillée par ma lettre comme je l’avais ete moi-même par la visite du président, se hâta de réparer sa négligence, en me répondant neuf jours après eu ces termes obligeants : « lOjuiu 1777.

« Monsieur, il nous est absolument impossible « de regarder notre conseil comme étranger u dans le compte que vus n. ms demandez. Le u sieur de Nesle était encore notre caissier lors des u premières représentations du Barbu r de Sévill ; .’notre conseil ayant assisté aux comptes que n M. de Nesle nous a rendus, ce n’est que par ses « lumières que nous pourrons nous guider. Vous « nous avez toujours propose d’assister à telle ■i assemblée qu’il lui sérail loisible d’indiquer « pour traiter cette affaire : si c’est encore voire .1 intention, prononcez, et nous le prierons île » s’assembler.

« Huant au refus que vous prétendez que nous •I faisons de jouer vos pièces, la circonstance présente vous prouvera le contraire, la dame la « Croisette débutant par Eugénie’. « Nous attendons votre réponse avec la confiance « de gens qui ne demandent que la continuation de ii la paix que vous invoquez, et qui auront toujours » pour vous les sentiments de la plus parfaite considération.

..V. n. qu’Eugénie

fait il. ii a la Comédie dt

n’appartcnaîl plus.1 L’autcUl

i la première rej résciitatioii.

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