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VISAGES DE FEMMES

afin de la regarder, cette tempête excellente, se fit attacher au grand mât de l’embarcation : Ce jeune Breton si hardi, c’était le chevalier de Cha teaubriand. Son départ n’avait pas été beaucoup moins déraisonnable que celui de Marceline.

Je ne sais pas à quelle époque Marceline rédigea le récit de son retour. Elle est morte en 1859. Depuis dix ans, elle avait pu lire les Mémoires d’outre-tombe. A-t-elle inventé son aventure des haubans à l’imitation de l’autre ?... Elle avait tant d’imagination qu’elle a bien pu le faire, et avec la sincérité de ces natures si ardentes. Mais il est bien possible aussi que Marceline ait eu, de son côté, la même idée absurde et poétique qui tenta le chevalier de Chateaubriand. Une sorte de folie extraordinaire occupait les esprits, sur la fin du dix-huitième siècle et au commencement du dix-neuvième. C’est bien le moins de ce que la révolution devait produire dans les têtes d’alors. Du reste, c’est de là qu’est sortie cette folie harmonieuse, le romantisme.

Marceline revint donc en France ; elle revit son pays natal... « Amour du berceau, sois béni, mystère doux et triste comme tous les amours!... »

A Douai, son père était vieilli, malade et plus pauvre que jamais. Son frère Félix était allé aux grandes guerres ; les Anglais l’avaient fait prisonnier ; maintenant, il peinait, captif, sur les pontons d’Écosse.

Avec une gentille bravoure, avec un héroïsme