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LES MYSTÈRES DE L’ILE SAINT-LOUIS

— Oh ! cela est vrai, reprit Roquelaure ; il vous aime activement, ma chère marquise.

— Et pourquoi ce mot ?

— Parce que c’est un amour en poste, un amour à franc étrier qui court de mademoiselle de Retz qu’il veut enlever, à madame d’Alluye qu’il aime à peine. La fille de je ne sais quel partisan de la place Royale l’occupe encore… Cependant il trouve le temps d’écrire à madame de Monaco et à madame d’Humières. Le comte est exact, c’est en homme d’ordre avant tout.

— Vous croyez ?

— Comment donc ! j’en suis certain. Hier soir, tenez, j’étais chez Turquois, le joaillier ; il y était attendu. — La terrible chose qu’une commande à M. de Lauzun, me dit Turquois. — Pourquoi donc ? — C’est que si, à dix heures précises, il ne tenait pas ce bracelet qu’il m’a commandé pour certaine dame, j’en serais pour mon ouvrage. C’est un chiffre en diamant surmonté d’un F, qui fera, ma foi, le plus merveilleux effet.

— Ah ! vraiment, reprit la marquise piquée au vif ; et pour qui ce charmant chiffre ?

— Turquois, en homme discret, s’est bien gardé de me le dire ; j’ai deviné.

— Et qu’avez-vous deviné, mon cher duc ?

— Cela n’était pas difficile, un F, chère marquise, ce ne pouvait être que mademoiselle de Fontanges.

— Mademoiselle de Fontanges ! pour le coup c’est d’une noirceur…

— C’est ce que je me suis dit. Quand le roi lui-même, le roi se plaît à orner ce cou d’albâtre, quand il lui prodigue…

— Assez, assez, duc, interrompit la marquise avec dépit ou vous êtes un fourbe, ou M. de Lauzun est un infidèle, un parjure…

— Je n’accepte ici que la seconde de ces vérités. Au re-