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CHAPITRE XV.

monstres qui se donnaient le nom de sages ! Qui pourrait ne pas frémir jusqu’au fond de l’âme, à la vue de ces milliers de malheureux, que le désespoir force à reprendre la vie sauvage, pour se dérober à des maux insupportables, causés ou tolérés par ces lois injustes, qui ont toujours enchaîné, outragé la multitude, pour favoriser uniquement un petit nombre d’hommes privilégiés !

Mais la superstition et la tyrannie ses poursuivent ; on les accuse de crimes impossibles ou imaginaires ; ou bien ils sont coupables, mais seulement d’avoir été fidèles aux lois de la nature. N’importe ! des hommes doués des mêmes sens, et sujets aux mêmes passions, se plaisent à les trouver criminels, prennent plaisir à leurs tourmens, les déchirent avec solennité, leur prodiguent les tortures, et les livrent en spectacle à une multitude fanatique qui jouit lentement de leurs douleurs.

Plus les châtimens seront atroces, plus le coupable osera pour les éviter. Il accumulera les forfaits, pour se soustraire à la peine qu’un premier crime a méritée.

Les pays et les siècles où les supplices les plus affreux ont été mis en usage, sont aussi ceux où l’on a vu les crimes les plus horribles. Le