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DES DÉLITS ET DES PEINES.

accoutumé à parcourir et à comparer rapidement un grand nombre d’idées et de sentimens opposés, tire de leur contraste un résultat qui fait la base de sa conduite, dès lors moins incertaine et moins dangereuse.

Il est donc de la plus grande importance de punir promptement un crime commis, si l’on veut que dans l’esprit grossier du vulgaire, la peinture séduisante des avantages d’une action criminelle, réveille sur-le-champ l’idée d’un châtiment inévitable. Une peine trop différée rend moins étroite l’union de ces deux idées : crime et châtiment. Si le supplice d’un coupable fait alors quelque impression, ce n’est plus que comme spectacle, puisqu’il ne se présente au spectateur que quand l’horreur du crime, qui contribue à fortifier l’horreur de la peine, est déjà affaiblie dans les esprits[1].

  1. « Le marquis de Beccaria a très-bien observé que ces longs délais entre le crime et la peine détruisent presque tout le fruit qu’on pouvait espérer de l’exemple. Le délit se trouve oublié quand la sentence est mise à exécution. Le spectateur ne voit plus le châtiment du criminel dans la mort de l’individu. Par une suite nécessaire, il n’emporte pas le sentiment de l’équité de la loi, ni du danger de la violer ; toutes ses