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CHAPITRE XXI.

D’ailleurs, l’usage de mettre à prix la tête d’un citoyen renverse toutes les idées de morale et de vertu, qui sont déjà si faibles et si chancelantes dans l’esprit humain. D’un côté, les lois punissent la trahison ; de l’autre, elles l’autorisent. Le législateur resserre d’une main les liens du sang et de l’amitié, et de l’autre il récompense celui qui les brise. Toujours en contradiction avec lui-même, tantôt il cherche à répandre la confiance et à rassurer les esprits soupçonneux, tantôt il sème la défiance dans tous les cœurs. Pour prévenir un crime il en fait naître cent.

De pareils usages ne conviennent qu’aux nations faibles, dont les lois ne servent qu’à

    ne puisse échapper, et alors la force n’est plus la force. Je voudrais que l’usage de mettre la tête à prix fût réservé pour les crimes les plus atroces, et sur-tout pour celui qui tend immédiatement à la dissolution et à la destruction de la société… »

    Ici finissent les notes de Diderot.

    « Voilà, dit-il en terminant, tout ce que je trouve à redire dans ce bel ouvrage, plein de génie et de vertu. Il est essentiel pour l’humanité, qu’il soit porté à sa perfection, et convaincant d’un bout à l’autre, même pour le vulgaire ; car c’est par le vulgaire que les vérités utiles sont obligées de passer, pour arriver comme un cri public, aux oreilles du gouvernement. »