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CHAPITRE XXXVI.

des lumières de la religion, je dirais qu’il y a une grande différence entre ce délit et tous les autres. L’adultère est produit par l’abus d’un besoin constant, commun à tous les mortels, antérieur à la société dont il est lui-même le fondateur ; au lieu que les autres délits, qui tendent plus ou moins à la destruction du pacte social, sont plutôt l’effet des passions du moment que des besoins de la nature.

Ceux qui ont lu l’histoire, et qui ont étudié les hommes, peuvent reconnaître que le nombre des délits produits par la tendance d’un sexe vers l’autre, est, dans le même climat, toujours égal à une quantité constante. Si cela est, toute loi, toute coutume dont le but serait de diminuer la somme totale des effets de cette passion, serait inutile et même funeste, parce que l’effet de cette loi serait de charger une portion de la société de ses propres besoins et de ceux des autres. Le parti le plus sage serait donc de suivre en quelque sorte la pente du fleuve des passions, et d’en diviser le cours en un nombre de ruisseaux suffisans pour empêcher partout deux excès contraires, la sécheresse et les débordemens.