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DES DÉLITS ET DES PEINES

de l’avantage pour lui-même, tandis que l’homme social est quelquefois porté, par des lois vicieuses, à nuire sans profit.

Le despote sème la crainte et l’abattement dans l’âme de ses esclaves ; mais cette crainte et cet abattement se rejettent sur lui-même, remplissent bientôt son cœur, et le livrent en proie à des maux plus grands que ceux qu’il cause.

Celui qui se plaît à inspirer la terreur, court peu de risques, s’il n’effraie que sa famille et les personnes qui l’entourent. Mais lorsque la terreur est générale, lorsqu’elle frappe une grande multitude d’hommes, le tyran doit frémir. Qu’il craigne la témérité, le désespoir ; qu’il redoute sur-tout l’homme audacieux, mais prudent, qui saura adroitement soulever contre lui des mécontens, d’autant plus faciles à séduire, que l’on réveillera dans leur âme les plus chères espérances, et que l’on aura soin de leur montrer les périls de l’entreprise partagés entre un grand nombre de complices. Joignez à cela que les malheureux attachent moins de prix à leur existence, en proportion des maux qui les accablent.

Voilà sans doute pourquoi les offenses sont