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CHAPITRE IV.

ces jeunesses ! Vous lui avez chanté victoire aux oreilles ? Seigneur bon Dieu, massa Georgie, vous feriez rire un hanneton !

— Oui, reprit Georgie, je lui ai dit : « Tom, si vous voyiez seulement les pâtés de tante Chloé ! ce sont là des pâtés ! »

— C’est grand’pitié qu’il n’en voie pas ! reprit tante Chloé, émue de compassion à l’idée des ténèbres où était plongé Tom Lincoln. Vous devriez l’inviter à dîner un de ces jours, mon bijou. Ce serait gentil de vot’part. Vous savez, massa Georgie, qu’il ne faut pas mépriser les autres, ni tirer vanité de ses avantages, vu que nos avantages nous sont donnés d’en haut, et c’est pas chose à oublier, ajouta-t-elle d’un air grave.

— Je compte précisément inviter Tom la semaine prochaine ; tu feras de ton mieux, tante Chloé, pour lui faire ouvrir de grands yeux. Nous le bourrerons si bien qu’il ne s’en relèvera pas d’une quinzaine !

— Oui, oui, s’écria tante Chloé ravie, massa verra ! Seigneur Dieu ! quand je pense à quelques-uns de nos dîners ! Vous rappelez-vous, massa, le grand pâté de volaille que j’avais fait le jour du général Knox ? Moi et maîtresse nous nous sommes quasiment disputées à cause de ce pâté ! Je ne sais pas ce qui passe par l’esprit des dames quelquefois ; mais quand une pauvre créature est affairée à ses fourneaux, qu’elle répond de tout, qu’elle ne sait plus où donner de la tête, c’est juste le moment qu’elles prennent pour venir tourner dans la cuisine et se mêler de ce qui ne les regarde pas ! Maîtresse voulait que je fisse comme ci, puis comme ça : finalement, la moutarde me monta au nez, et je lui dis : « Maîtresse, regardez-moi un peu vos belles mains blanches, et vos beaux longs doigts tout reluisants de bagues, comme mes lis blancs reluisent de rosée ! et voyez à côté mes grosses pattes noires ! vous semble-t-il pas que le bon Dieu m’a créée et mise au monde pour faire de la croûte de