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HISTOIRE D’UNE JEUNE CRÉOLE.

chercher celui des instruments qui portait le nom de la faute commise, et il s’en servait sans pitié. Il était fâcheux peut-être qu’il n’eût pas usé de ce régime pour corriger sa petite-fille.

« Quel dommage qu’on ne fasse pas un mousse d’une pareille gaillarde ! disaient les hommes de l’équipage qui, malgré tout, avaient fini par la prendre en amitié. Un petit lion pour le courage, le pied marin, le mot pour rire ! toutes les qualités, quoi ! »

La da gémissait, roulait les yeux et arrachait toute la laine de son crâne sans aucun résultat ; le capitaine intervenait avec sa grosse voix pour menacer de mettre la rebelle aux arrêts, voire de lui donner les étrivières, mais Yette ne faisait qu’en rire ; elle savait bien qu’il n’était pas si sévère, car, souvent il l’avait prise sur ses genoux en lui parlant de ses petits-neveux qui l’attendaient dans son pays de Bretagne. Il allait même excuser son indisciplinable protégée auprès des gens qui se plaignaient de visites indiscrètes faites dans leurs cabines, où tout était brisé, mis sens dessus dessous par Mlle Yette. Les excentricités dont elle se rendait coupable n’empêchaient pas cette dernière, chaque soir, avant de s’endormir, de parler avec larmes de sa mère chérie ; mais les