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HISTOIRE D’UNE JEUNE CRÉOLE.

— Comment ! vous défendez ! vous défendez !… Vous !… »

Mlle de Clairfeu vint regarder Yette sous le nez de son air le plus impertinent, mais presque aussitôt il lui sembla qu’un serpent l’enlaçait, l’étouffait ; et elle alla tomber meurtrie sur le maigre gazon qui représentait la pelouse.

Yette, malgré la petitesse de ses mains et les attaches extraordinairement fines de tous ses membres, était d’une souplesse, d’une vigueur remarquables. Plusieurs pensionnaires tombèrent sur elle à la fois sous prétexte de venger leur compagne. Les plus raisonnables se tenaient à l’écart de la bagarre. Yette se défendait, aidée de la seule Héloïse qui, bientôt accablée par le nombre, dut battre en retraite.

« Cette petite diablesse mord ! cria soudain Mlle Raymond.

— Pourvu qu’elle ne soit pas enragée ! »

Avec des cris et des rires le troupeau s’éparpilla de tous côtés.

Yette, le visage égratigné, la robe en loques, alla s’asseoir dans un coin avec Héloïse.

« Sont-elles toujours comme cela ? demanda-t-elle en versant quelques larmes de rage, plus encore que de douleur.