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YETTE CHEZ ELLE.

qu’un si habile homme prononce prune pour brune ?

— Tiens ! tu n’auras jamais que sept ans, petite folle, » répondait Yette, à demi souriante, à demi fâchée.

Ce fut cet hiver-là que Cora, autant pour s’habituer à vaincre l’ennui que pour faire à sa sœur un grand plaisir, entreprit de rédiger un cahier de notes et d’impressions relatives à la Martinique. Elle écrivait facilement et pensa que rien n’intéresserait Yette autant que le récit, même un peu décousu, de ce qui avait rempli sa vie durant leurs années de séparation. Dans ce cahier, elle fit revivre les paysages de l’île natale, la maison paternelle, les vieux serviteurs, les animaux favoris, et quand, le jour de l’an venu, elle offrit ce cahier, Cora fut payée de ses peines, voire de toutes les taches d’encre qu’elle s’était faites aux doigts, parle ravissement de sa chère Yette. Quelle plus grande joie, en effet, peut-on donner à l’exilé que de le ramener dans sa patrie ? Le cahier de Cora fut lu et relu à haute voix durant les longues soirées d’hiver. Nous en avons détaché, au hasard et pêle-mêle, quelques anecdotes, quelques descriptions qui nous ont paru pouvoir intéresser nos lecteurs, et contribuer à leur faire connaître