fit ! personne n’avait ni appétit, ni gaieté, personne ne réussissait à donner le change aux tristes préoccupations du moment.
Rentrée à l’habitation, Yette distribua des souvenirs aux trois petits nègres, ses compagnons ordinaires. Loulou eut un collier de graines de courbaril ; Mesdélices, la préférée, une petite croix d’or, et Tom atteignit au faîte de toutes ses ambitions. Vain comme le sont ceux de sa race, il avait rêvé d’avoir des souliers ; Yette lui en donna une belle paire toute neuve. Il faut dire qu’elle n’usait guère de souliers, étant aussi empressée à les quitter pour courir pieds nus dans la savane, que Tom était envieux d’en avoir. Le négrillon fit une culbute de contentement qui scandalisa Mesdélices : sauter quand petite maîtresse partait !
Là-dessus, Tom répliqua qu’on aurait beau faire, qu’il ne quitterait jamais petite maîtresse.
« Et comment t’y prendras-tu, mon pauvre Tom ? On m’envoie en France.
— Moë qué couri ! répondit-il en montrant ses jambes nerveuses.
— Courir ! il faudrait nager, et tu ne sais pas ! Et puis nager pendant quinze cents lieues de suite, y penses-tu ? Je n’ai pas assez d’argent pour