Page:Bergerat - Contes de Caliban, 1909.djvu/215

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lui-même ? Pour aborder un rocher, formant îlot, où il pensait se tirer d’affaire, il avait retiré ses bottes, qui, toutes flottantes, vinrent échouer sur le rivage. En vérité, c’est un étrange rêve !

Mon petit Tom Pouce, fou de joie de voir ainsi onduler les bottes comme des algues déracinées, s’était élancé de la voiture, et, suivi de ses deux soeurettes, qui n’avaient pas lâché leurs bouquets de violettes, il courut les repêcher sur la grève. Puis il les chaussa. Je t’ai dit qu’elles étaient immenses, mais elles s’étrécirent à la mesure de ses pieds d’enfant. Polyphème hurlait sur son îlot. Et lorsque les bottes furent chaussées, le gai petit voleur prit sous chaque bras l’une et l’autre des bouquetières, la brune à gauche, la blonde à droite, il fit un pas de vingt-huit kilomètres et s’enfuit, l’ingrat, chez la Mère l’Oie.

Je mis, comme bien tu penses, pour le rattraper sur les chemins, la vertigineuse à l’allure de la course à la mort, mais je ne sais pas où elle demeure, hélas ! la Mère l’Oie — et je me suis réveillé.

Es-tu ferré en oniromancie ? Qu’est-ce qu’il veut dire, ce songe-là ? Peut-être ceci, que les poètes sont pour quelque chose dans l’invention