Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 4, 1913.djvu/237

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UNE ÉLECTION


Il y avait une fois, à Bocognano, un maire qui n’était pas de la même opinion que les Bellacoscia.

Je ne sais pas du tout en ce moment, quelle était l’opinion des Bellacoscia ; mais s’ils étaient bonapartistes, le maire était républicain, et s’ils étaient républicains, le maire était bonapartiste.

Pauvre maire ! Quelle profession !

Le malheureux ne s’était-il pas ingéré, un jour d’élection, de vouloir que ses administrés votassent tous selon son cœur de maire et pour le candidat de son choix ! À cet effet, il eut l’idée de distribuer à ceux de ses électeurs qui ne savaient pas lire des bulletins candidement numérotés, où ceux qui savaient lire pouvaient épeler le nom de ce candidat bien-aimé.

« Vous arriverez à la file devant l’urne, leur avait-il dit, et successivement vous jetterez chacun votre papier, non un autre, dans le trou. J’ai vos numéros, et je saurai quel est celui qui aura trahi ma confiance. Je ne vous en dis pas davantage. Allez !… »