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Page:Bergerat - Théophile Gautier, 1879, 2e éd.djvu/174

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THÉOPHILE GAUTIER.
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struction ? Tu ne seras toute ta vie qu’un boulevardier ! Donne-moi une allumette pour rallumer mon cigare.

— Ainsi, repris-je, c’est afin d’obéir à une vocation contrariée pour le roman-feuilleton que vous avez, sous le titre de la Partie carrée, publié la Belle Jenny dans la Presse ?

— Voici comment cela s’est passé. La Presse donnait alors chaque matin, par tranches, je ne sais plus quel macaroni littéraire dont tous les abonnés, prétendait Girardin, se pourléchaient les babines. Il nous embêtait, Girardin, avec ce feuilleton ! “Pensez-en ce que vous voudrez, nous disait-il, il n’en est pas moins vrai que voilà un succès énorme. Vous êtes tous de grands écrivains, c’est entendu, mais il n’y en a pas un parmi vous qui soit fichu de m’amener dix abonnés avec sa prose. Ce n’est pas ma faute si le public préfère les histoires d’assassinats dans les égouts à Lélia ou à la Nouvelle Héloïse ! Le garçon qui me ficelle ce roman sait son métier, et quand il aura fini, je serai diablement embarrassé.”

« Moi, superlativement agacé, je dis à Girardin : “Vous voyez bien qu’il ne le sait pas, son métier ! car s’il le savait, il ne finirait pas ! Le génie en ce genre est d’être interminable. Si jamais on me demande un roman-feuilleton, à moi, j’exigerai qu’on me garantisse dix ans de