Aller au contenu

Page:Bergerat - Théophile Gautier, 1879, 2e éd.djvu/29

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
XXI
PRÉFACE.

les aoristes des prétérits trépassés… J’ai comme le sentiment de n’être déjà plus vivant. »

À quelques jours de là, j’apprenais que notre ami avait demandé une consultation à Ricord. J’allais aussitôt le voir. « Ricord, me disait-il, d’une voix dolente et ennuyée, croit que c’est la valvule mitrale du cœur qui ne va plus : ou elle se relâche ou elle se resserre. Il m’a ordonné du bromure de potassium dans du sirop d’asperge… mais ce n’est qu’un traitement préparatoire… Il doit revenir samedi. » Et s’agenouillant sur un fauteuil, dans une de ces poses tortillées qu’il affectionnait pour s’entretenir des choses de littérature et d’art, et approchant son oreille de ma bouche, il me demandait avec une certaine chaleur, si je trouvais de l’intérêt à son Histoire du Romantisme. Il était un peu tourmenté. Il se sentait si fatigué qu’il craignait que ça ne valût pas ce qu’il aurait pu faire. Il regrettait que la forme du journal ne lui permît pas de développer l’esthétique de la matière. Il se réservait de traiter la question, quelque jour, dans une revue. Puis bientôt le dégoût de son métier, ce dégoût que j’avais déjà ren-