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Page:Bergerat - Théophile Gautier, 1879, 2e éd.djvu/45

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SOUVENIRS.

l’actualité productive, débattue, inédite, que le public recherche dans les œuvres des vivants. Toutes ces pages volantes, jetées par l’écrivain aux quatre vents du journalisme, emportées dans les tourbillons de ce Maelstrom qu’on appelle l’actualité, il a suffi de les recueillir, de les classer et de les numéroter pour qu’elles composassent des livres tout nouveaux, d’un intérêt exceptionnel et d’une forme parfaite. Il n’y a peut-être pas d’autre écrivain dans notre langue avec lequel une pareille entreprise eût pu être tentée sans péril, et ici l’artiste trouve sa récompense de cet admirable souci de la perfection qui ne l’abandonna jamais, dans l’expression de sa pensée, même au plus fort de l’improvisation fugitive. Théophile Gautier a trouvé le secret de n’écrire que des livres en écrivant des articles de journal. Bel exemple et féconde leçon qui nous apprend à tous à concilier les exigences modernes d’une production surmenée avec le respect inaltérable de notre art, à gagner en même temps notre vie et notre réputation ; c’est la solution du problème posé à l’homme de lettres par la société. Rien de ce que le maître a signé ne méritant d’être perdu, tout se retrouve, et ainsi est réalisé et prouvé le sage aphorisme qui nous prescrit de laisser bâtir au Temps le monument qu’il doit épargner.

Ce monument, le Temps l’édifie, sous nos yeux,