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Page:Bergerat - Théophile Gautier, 1879, 2e éd.djvu/46

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THÉOPHILE GAUTIER.
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lentement ; il est déjà énorme ; mais aussi haut qu’il se dresse sur sa base de granit et de marbre, il n’atteint pas encore au tiers de son élévation. Peu de personnes soupçonnent l’étendue de l’œuvre de Théophile Gautier. Il en a été établi un catalogue qui fournit à lui seul la matière d’un gros volume. La partie critique de cette œuvre, réunie en livres, dépasserait certainement en nombre la collection des Lundis de Sainte-Beuve ; et je ne parle que de la critique littéraire, dramatique ou bibliographique. Quant à la critique artistique proprement dite, salons, musées, expositions en France et en Europe, j’estime qu’elle irait au double. La somme des romans, poésies, contes, nouvelles, voyages, pièces de théâtre et œuvres d’imagination équivaut à peu près à l’œuvre de Balzac. Si l’on voulait éditer complètement tout Théophile Gautier, on ne s’en tirerait pas à moins de trois cents volumes (il a donné lui-même ce chiffre effrayant), mais l’on aurait dressé l’Encyclopédie du XIXe siècle. Voilà pourquoi, ajoutait-il tristement, je passe pour un paresseux ! Aussi, quand je me présente à l’Académie, on me demande : « Qu’est-ce que vous avez fait[1] ? »

  1. À propos de l’Académie, le lecteur verra suffisamment, dans la correspondance du poëte, ce qu’il pensait de cette Suzanne aux quarante vieillards dont, par respect pour d’augustes amitiés plutôt que par illusion personnelle, il s’obstina trop longtemps à solliciter les faveurs cacochymes. Voici d’ailleurs comme il m’en parla, un jour, en promenade, avec la mansuétude ironique