Page:Bergson - L’Énergie spirituelle.djvu/212

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sentation « unique ». Mais de ce qu’une représentation est une, il ne suit pas que ce soit une représentation simple. Elle peut, au contraire, être complexe, et nous avons montré qu’il y a toujours complexité quand l’esprit fait effort, que là est même la caractéristique de l’effort intellectuel. C’est pourquoi nous avons cru pouvoir expliquer l’effort de l’intelligence sans sortir de l’intelligence même, par une certaine composition ou une certaine interférence des éléments intellectuels entre eux. Au contraire, si l’on confond ici unité et simplicité, si l’on s’imagine que l’effort intellectuel peut porter sur une représentation simple et la conserver simple, par où distinguera-t-on une représentation, quand elle est laborieuse, de cette même représentation, quand elle est facile ? par où l’état de tension différera-t-il de l’état de relâchement intellectuel ? Il faudra chercher la différence en dehors de la représentation elle-même. Il faudra la faire résider soit dans l’accompagnement affectif de la représentation, soit dans l’intervention d’une « force » extérieure à l’intelligence. Mais ni cet accompagnement affectif ni cet indéfinissable supplément de force n’expliqueront en quoi et pourquoi l’effort intellectuel est efficace. Quand viendra le moment de rendre compte de l’efficacité, il faudra bien écarter tout ce qui n’est pas représentation, se placer en face de la représentation elle-même, chercher une différence interne entre la représentation purement passive et la même représentation accompagnée d’effort. Et l’on s’apercevra nécessairement alors que cette représentation est un composé, et que les éléments de la représentation n’ont pas, dans les deux cas, le même rapport entre eux. Mais, si la contexture intérieure diffère, pourquoi chercher ailleurs que dans cette diffé-