Page:Bergson - L’Énergie spirituelle.djvu/224

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de sous-jacent à la représentation que nous en avons, un pouvoir mystérieux dont nous n’apercevons que l’effet produit sur nous. Mais cela apparaît tout de suite comme contradictoire dans la doctrine qui réduit le mouvement lui-même à une représentation, car c’est dire qu’un petit coin de la représentation est la représentation tout entière.

Je conçois bien, dans l’hypothèse idéaliste, que la modification cérébrale soit un effet de l’action des objets extérieurs, un mouvement reçu par l’organisme et qui va préparer des réactions appropriées : images parmi des images, images mouvantes comme toutes les images, les centres nerveux présentent des parties mobiles qui recueillent certains mouvements extérieurs et les prolongent en mouvements de réaction tantôt accomplis, tantôt commencés seulement. Mais le rôle du cerveau se réduit alors à subir certains effets des autres représentations, à en dessiner, comme nous le disions, les articulations motrices. C’est en cela que le cerveau est indispensable au reste de la représentation, et qu’il ne peut être lésé sans qu’une perturbation plus ou moins générale de la représentation s’ensuive. Mais il ne dessine pas les représentations elles-mêmes ; car il ne pourrait, lui représentation, dessiner le tout de la représentation que s’il cessait d’être une partie de la représentation pour devenir le tout lui-même. Formulée dans une langue rigoureusement idéaliste, la thèse du parallélisme se résumerait donc dans cette proposition contradictoire : la partie est le tout.

Mais la vérité est qu’on passe inconsciemment du point de vue idéaliste à un point de vue pseudo-réaliste. On a commencé par faire du cerveau une représentation comme les autres, enchâssée dans les autres représentations et insé-