Page:Bergson - La Pensée et le Mouvant.djvu/65

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d’un genre, simplement parce qu’elle reste elle-même : sonnette et rien que sonnette, elle ne peut pas faire autre chose, si elle réagit, que de sonner. Il va sans dire que, lorsque la réflexion aura élevé à l’état de pensée pure des représentations qui n’étaient guère que l’insertion de la conscience dans un cadre matériel, attitudes et mouvements, elle formera volontairement, directement, par imitation, des idées générales qui ne seront qu’idées. Elle y sera aidée puissamment par le mot, qui fournira encore à la représentation un cadre, cette fois plus spirituel que corporel, où s’insérer. Il n’en est pas moins vrai que pour se rendre compte de la vraie nature des concepts, pour aborder avec quelque chance de succès les problèmes relatifs aux idées générales, c’est toujours à l’interaction de la pensée et des attitudes ou habitudes motrices qu’il faudra se reporter, la généralisation n’étant guère autre chose, originellement, que l’habitude, remontant du champ de l’action à celui de la pensée.

Mais, une fois déterminées ainsi l’origine et la structure de l’idée générale, une fois établie la nécessité de son apparition, une fois aussi constatée l’imitation de la nature par la construction artificielle d’idées générales, il reste à chercher comment des idées générales naturelles qui servent de modèle à d’autres sont possibles, pourquoi l’expérience nous présente des ressemblances que nous n’avons plus qu’à traduire en généralités. Parmi ces ressemblances il en est, sans aucun doute, qui tiennent au fond des choses. Celles-là donneront naissance à des idées générales qui seront encore relatives, dans une certaine mesure, à la commodité de l’individu et de la société, mais que la science et la philosophie n’auront qu’à dégager de cette gangue pour obtenir une vision plus ou moins approximative de quelque aspect