Page:Bergson - Le Rire.djvu/176

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déséquilibrés d’une même espèce sont portés par une secrète attraction à se rechercher les uns les autres. Sans précisément relever de la médecine, le personnage comique est d’ordinaire, comme nous l’avons montré, un distrait, et de cette distraction à une rupture complète d’équilibre le passage se ferait insensiblement. Mais il y a une autre raison encore. Si l’objet du poète comique est de nous présenter des types, c’est-à-dire des caractères capables de se répéter, comment s’y prendrait-il mieux qu’en nous montrant du même type plusieurs exemplaires différents ? Le naturaliste ne procède pas autrement quand il traite d’une espèce. Il en énumère et il en décrit les principales variétés.

Cette différence essentielle entre la tragédie et la comédie, l’une s’attachant à des individus et l’autre à des genres, se traduit d’une autre manière encore. Elle apparaît dans l’élaboration première de l’œuvre. Elle se manifeste, dès le début, par deux méthodes d’observation bien différentes.

Si paradoxale que cette assertion puisse paraître, nous ne croyons pas que l’observation des autres