Page:Bergson - Les Deux Sources de la morale et de la religion.djvu/324

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règle et à règlement). Que sera-ce, quand viendront des problèmes presque aussi graves, celui de la répartition des matières premières, celui de la plus ou moins libre circulation des produits, plus généralement celui de faire droit à des exigences antagonistes présentées de part et d’autre comme vitales ? C’est une erreur dangereuse que de croire qu’un organisme international obtiendra la paix définitive sans intervenir, d’autorité, dans la législation des divers pays et peut-être même dans leur administration. Qu’on maintienne le principe de la souveraineté de l’État, si l’on veut : il fléchira nécessairement dans son application aux cas particuliers. Encore une fois, aucune de ces difficultés n’est insurmontable si une portion suffisante de l’humanité est décidée à les surmonter. Mais il faut les regarder en face, et savoir à quoi l’on consent quand on demande la suppression des guerres.

Maintenant, ne pourrait-on pas abréger la route à par. courir, peut-être même aplanir tout d’un coup les difficultés au lieu de les tourner une à une ? Mettons à part la question principale, celle de la population, qu’il faudra bien résoudre pour elle-même, quoi qu’il arrive. Les autres tiennent surtout à la direction que notre existence a prise depuis le grand développement de l’industrie. Nous réclamons le confort, le bien-être, le luxe. Nous voulons nous amuser. Qu’arriverait-il si notre vie devenait plus austère ? Le mysticisme est incontestablement à l’origine des grandes transformations morales. L’humanité en paraît sans doute aussi éloignée que jamais. Mais qui sait ? Au cours de notre dernier chapitre, nous avions cru entrevoir une relation entre le mysticisme de l’Occident et sa civilisation industrielle. Il faudrait examiner les choses plus attentivement. Tout le monde sent que l’avenir immédiat va dépendre en grande partie de