Page:Bergson - Matière et mémoire.djvu/141

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faut en outre l’avoir fait comprendre à son corps. Or, la logique du corps n’admet pas les sous-entendus. Elle exige que toutes les parties constitutives du mouvement demandé soient montrées une à une, puis recomposées ensemble. Une analyse complète devient ici né­cessaire, qui ne néglige aucun détail, et une synthèse actuelle, où l’on n’abrège rien. Le schème imaginatif, composé de quelques sensations musculaires nais­santes, n’était qu’une esquisse. Les sensations musculaires réellement et complètement éprouvées lui donnent la couleur et la vie.

Reste à savoir comment un accompagnement de ce genre pourrait se pro­duire, et s’il se produit toujours en réalité. On sait que la prononciation effective d’un mot exige l’intervention simultanée de la langue et des lèvres pour l’articulation, du larynx pour la phonation, enfin des muscles thoraciques pour la production du courant d’air expiratoire. À chaque syllabe prononcée correspond donc l’entrée en jeu d’un ensemble de mécanismes, tout montés dans les centres médullaires et bulbaires. Ces mécanismes sont reliés aux centres supérieurs de l’écorce par les prolongements cylindroaxiles des cellules pyramidales de la zone psycho-motrice ; c’est le long de ces voies que chemine l’impulsion de la volonté. Ainsi, selon que nous désirons articuler un son ou un autre, nous transmettons l’ordre d’agir à tels ou tels de ces méca­nismes moteurs. Mais si les mécanismes tout montés qui répondent aux divers mouvements possibles d’articulation et de phonation sont en relation avec les causes, quelles qu’elles soient, qui les actionnent dans la parole volontaire, il y a des faits qui mettent hors de doute la communication de ces mêmes méca­nismes avec la perception auditive des mots. Parmi