Page:Berlioz - Correspondance inédite, 1879, 2e éd. Bernard.djvu/123

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XIX.

À M. FERDINAND HILLER.


Paris, 18 juillet 1833.

Mon cher ami,

Vous devinez sans doute, au long et absurde silence que j’ai gardé avec vous, que l’état de liberté dans lequel vous m’avez laissé à votre départ n’a pas été long. Deux jours après que vous aviez quitté Paris, Henriette me fit prier instamment de venir la voir. Je fus froid et calme comme un marbre. Elle m’écrivit deux heures après ; j’y retournai, et après mille protestations et explications qui, sans la justifier complétement, la disculpaient au moins sur le point principal, j’ai fini par lui pardonner, et depuis lors je ne l’ai pas quittée un seul jour. Quand votre lettre m’est parvenue, le jeune homme qui me l’a remise ne m’ayant pas laissé son adresse, je n’ai pu vous envoyer la musique que vous me demandiez. J’aurais pu toutefois vous écrire plus tôt, sans l’immense préoccupation où je vis depuis longtemps. Vous veniez de faire une perte, d’ailleurs, pour laquelle je n’aurais su vous offrir que de bien pâles et faibles consolations. Vous aviez en votre père un ami qui ne s’est jamais démenti un seul instant depuis votre enfance, un guide et non un maître, un protecteur et non un gouverneur ; oh ! c’est précieux et rare. Vous avez dû ressentir une douleur étrange, inconnue, à cette séparation.