Page:Berlioz - Correspondance inédite, 1879, 2e éd. Bernard.djvu/166

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quartiers excentriques de Pétersbourg et jusque dans les champs, de neuf à onze heures du soir !… Que de larmes amères j’ai versées quand elle me disait comme la Marguerite de Faust : « Mon Dieu, je ne comprends pas ce que vous pouvez trouver en moi… je ne suis qu’une pauvre fille bien au-dessous de vous… il n’est pas possible que vous m’aimiez ainsi, etc., etc. » C’est pourtant si possible que c’est vrai, et que j’ai pensé mourir de désespoir quand j’ai passé devant le Grand-Théâtre en quittant en poste Pétersbourg. De plus, j’ai été réellement malade à Berlin de ne pas y trouver une lettre d’elle. Elle m’avait tant promis qu’elle m’écriverait !… Elle est sans doute mariée maintenant. Son fiancé, qui partit le soir de mon premier concert, est certainement revenu depuis longtemps.

O Dieu ! je nous vois encore sur le bord de la Newa, un soir, au soleil couchant… Quelle trombe de passion ! Je lui broyais le bras contre ma poitrine ; je lui chantais la phrase de l’adagio de Roméo et Juliette :

notation musicale

je lui promettais, je lui offrais, tout ce que je pouvais promettre et offrir… et je n’ai pas obtenu seulement deux