Page:Berlioz - Correspondance inédite, 1879, 2e éd. Bernard.djvu/212

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y déjeune sans vous. Mais vous me faites espérer votre visite et un deuxième quatuor. J’aurais de longues pages à barbouiller pour vous donner tous les détails des affaires de Weimar et de Londres et de Paris.

Je vous dirai seulement que cette petite excursion en Allemagne a été la plus charmante que j’aie jamais faite dans ce pays-là. Ils m’ont comblé, gâté, embrassé, grisé (dans le sens moral). Tout cet orchestre, tous ces chanteurs, acteurs, comédiens, tragédiens, directeurs, intendants réunis au dîner de l’hôtel de ville la nuit de mon départ, représentaient un ordre d’idées et de sentiments qu’on ne soupçonne pas en France. J’ai fini par pleurer comme deux douzaines de veaux, en songeant à ce que ce même Benvenuto m’a valu de chagrins à Paris. Cet excellent Liszt a été adorable de bonté, d’abnégation, de zèle, de dévouement. La famille ducale m’a comblé de toutes façons. Les jeunes princesses de Prusse ont été d’une grâce ravissante, elles ont eu des mots… surtout sur Roméo et Juliette, que nous avons exécuté en entier avec un chœur superbe de cent vingt voix. Puis le bouillant Griepenkerl, qui était venu de Brunswick et qui a oublié le peu de français qu’il savait, m’a dit, après la première représentation de Benvenuto, en m’embrassant avec fureur : E pur si muove, mon cher ! e pur si muove ! J’ai retouché quelques petites choses dans la partition, et arrangé le livret de manière à ce qu’il marche bien maintenant. On s’occupe de le traduire en italien.

Mais tout cela ne doit pas me faire oublier nos grandes solennités de Londres !… Il fallait voir cet immense public d’Exeter Hall, lancé après les morceaux de Roméo