Page:Berlioz - Correspondance inédite, 1879, 2e éd. Bernard.djvu/231

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petite lettre que le portier m’a donnée comme je sortais, m’a remis le cœur à l’aise. Je t’écris au milieu de mes courses dans ma chambre du Conservatoire, avec l’espoir que cette lettre sera plus heureuse que les trois dernières, qui, à ce qu’il paraît, par ton avant-dernière datée de Kiel, ne te sont pas parvenues. Je t’ai écrit à Kiel au reçu de ta lettre. Enfin, j’espère que nous allons nous voir, ne fût-ce que quelques jours. J’ai à t’annoncer une nouvelle qui ne t’étonnera probablement pas et dont j’avais fait part d’avance à ma sœur et à mon oncle à mon dernier voyage à la Côte. Je suis remarié. Cette liaison, par sa durée, était devenue, tu le comprends bien, indissoluble ; je ne pouvais ni vivre seul, ni abandonner la personne qui vivait avec moi depuis quatorze ans. Mon oncle, à sa dernière visite à Paris, fut lui-même de cet avis et m’en parla le premier. Tous mes amis pensaient de même. Tes intérêts, tu peux le penser, ont été sauvegardés. Je n’ai assuré à ma femme après moi, si je meurs le premier, que le quart de ma petite fortune ; encore, ce quart, je sais que son intention est de te le faire revenir par un testament. Elle m’a apporté en dot son mobilier, dont la valeur est plus considérable que nous ne pensions, mais qui devra lui être rendu si je meurs avant elle. Tout cela a été réglé d’après les indications que m’avait données mon beau-frère. Ma position, plus régulière, est plus convenable ainsi. Je ne doute pas, si tu as conservé quelques souvenirs pénibles et quelques dispositions peu bienveillantes pour mademoiselle Récio, que tu ne les caches au plus profond de ton âme par amour pour moi. Ce mariage s’est fait en petit comité, sans bruit comme sans mystère. Si tu m’écris à ce sujet, ne m’écris rien que je ne puisse