Page:Berlioz - Correspondance inédite, 1879, 2e éd. Bernard.djvu/314

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CXXI.

À MADAME MASSART.


Paris, 23 septembre au soir, au coin de mon feu (1863).

Chère madame Massart, vous croyez peut-être que, n’ayant plus à recevoir chez vous ni tasses de chocolat, ni sonates de Beethoven, ni quatuors, je ne pense plus à vous ?… Vous en êtes capable ; vous avez sucé le venin des Maximes de la Rochefoucauld ; vous croyez qu’il y a un motif intéressé à toutes nos actions ! — Hélas ! cela pourrait bien être.

Pourtant, qu’est-ce qui m’oblige à vous écrire, ce soir ? Qu’est-ce qui me force à envoyer une poignée de main à votre mari ? Qu’est-ce qui me porte à m’apitoyer sur votre sort ? car, j’en suis sûr, vous traînez une vie misérable dans votre petite boîte de sapin, pompeusement nommée « maison de campagne », où il n’y a de place que pour un piano, sans queue, où vous sentez la mer à toute heure, où il vente à décorner des bœufs, où, quand vous jouez la sonate en fa mineur, vous vous ennuyez vous-même,

Ayant pour auditeurs des crabes seulement…

Il faut qu’on dise : « Madame Massart est à la campagne, dans sa villa ; elle prend des bains de mer, elle folâtre sur les grèves, elle aspire les senteurs marines et les effluves de l’infini… » O blagues colossales et puériles ! Je vous plains ; mais il faut bien faire son métier de banquiste…

C’est égal, je vous replains.