Page:Berlioz - Correspondance inédite, 1879, 2e éd. Bernard.djvu/377

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de jeune homme (quoiqu’il ait 49 ans), chez M. Lubbert, directeur de l’Opéra, lui parler de moi. Il savait qu’Atala était reçu et m’était destiné ; il pressa beaucoup Lubbert de me faire jouer, l’assurant que rien n’était ridicule comme les obstacles qu’on me faisait éprouver et qu’il était de son intérêt de les lever. À tout cela, Lubbert se contenta de répondre que beaucoup de gens lui avaient parlé de moi, les uns avec admiration, les autres lui assurant que j’étais fou ; d’autres, qu’il n’y avait aucun fond à faire sur moi (entre autres Cherubini, qui n’a jamais entendu de sa vie une note de moi, si on excepte les balivernes de l’Institut défigurées sur un piano) ; mais que, dans tous les cas, il avait l’intention de m’écrire pour m’engager à ne pas faire la musique d’Atala, parce que, malgré sa réception, il ne voulait pas monter ce poëme, dont il ne voulait pas introduire le genre à l’Opéra. « D’ailleurs, ajouta-t-il, je répète encore ce que j’ai dit déjà tant de fois : il me faut de l’argent ; rien ne fait plus d’argent que la musique d’Auber, parce que le peuple l’aime. Ainsi, j’ai assez d’Auber et de Rossini. Beethoven et Weber reviendraient au monde et m’apporteraient des opéras, que je n’en voudrais pas. »

À Feydeau, c’est le dernier degré de la dégradation musicale ; ils ne pourraient m’exécuter. Le directeur va faire banqueroute incessamment. Il faut absolument laisser un théâtre nouveau jouer de la musique nouvelle ; il faut que cet odieux privilège tombe, et il tombera si, à la Chambre des députés, la demande en est faite. Benjamin Constant et deux autres devaient se charger de la présenter, si la prorogation ne fût survenue. Conçoit-on que les Allemands, les Italiens, tous les étrangers puissent élever des théâtres