Page:Berlioz - Correspondance inédite, 1879, 2e éd. Bernard.djvu/93

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répandus à Florence sur les dangers que courait l’Académie étaient un peu exagérés, mais fondés. Les Transteverini, supposant les Français partisans de la révolution et hostiles au pape, voulaient tout simplement mettre le feu à l’Académie et nous égorger tous. Ils étaient déjà venus plusieurs fois examiner les avenues du jardin, et madame Horace en avait rencontré un dans une allée, qui l’avait menacée d’un long couteau qu’il montrait sous son manteau. Aussi notre directeur avait-il armé tout le monde de fusils à deux coups, pistolets, etc… Pourtant il n’est rien résulté de tout cela qu’une tarentelle que les Transteverini ont composée sur la mort prochaine des Français, et qu’ils venaient chanter sous nos fenêtres. Tous les camarades qui m’attendaient m’ont reçu avec la cordialité la plus franche ; il m’a fallu quatre ou cinq jours pour retenir les noms de chacun, et, comme on se tutoie, j’étais obligé de dire à tout instant à quelqu’un : « Comment t’appelles-tu donc, toi ? »

De M. Horace et de sa famille j’ai reçu un très-bon accueil ; mais, quand le vieux Carle Vernet a su que j’admirais Gluck, il n’a plus voulu me quitter : « C’est que, voyez-vous, me disait-il, M. Despréaux prétendait que tout cela était rococo, et que Gluck était perruque. »

J’ai trouvé Mendelssohn ; Monfort le connaissait déjà, nous avons été bien vite ensemble. C’est un garçon admirable, son talent d’exécution est aussi grand que son génie musical, et vraiment c’est beaucoup dire. Tout ce que j’ai entendu de lui m’a ravi ; je crois fermement que c’est une des capacités musicales les plus hautes de l’époque. C’est lui qui a été mon cicerone ; tous les matins, j’allais le trouver