Page:Berlioz - Les Grotesques de la musique, 1859.djvu/230

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petit soubresaut des plus disgracieux. Voilà de la barbarie !

Dans un livre très-bien fait sous plusieurs rapports, intitulé Essai de rhythmique française, M. Ducondut a prouvé fort catégoriquement, que malgré le préjugé qui existe contre ses aptitudes à cet égard, la langue française pouvait se prêter sans peine à toutes les formes de vers et à toutes les divisions rhythmiques, et que si on n’avait pas fait jusqu’à présent usage des formes qu’il croit indispensables à la musique, il fallait s’en prendre aux poëtes et non pas accuser l’insuffisance de la langue. Les exemples qu’il donne de vers rhythmiques de toutes sortes démontrent avec évidence sa théorie. Mais cette théorie, admettant comme une nécessité absolue de la poésie lyrique l’emploi des règles qu’elle donne, est en soi radicalement fausse, je le répète. La musique est en général insaisissable dans ses caprices, alors même qu’elle semble le moins en avoir ; et hors les cas exceptionnels dont j’ai parlé tout à l’heure, il est parfaitement insensé de prétendre n’employer pour le chant que des vers rhythmiques, et de croire que la cadence monotone de vers ainsi faits facilitera la composition de la mélodie en lui imposant à l’avance une forme invariable ; car si la mélodie n’avait pas fort heureusement mille moyens de s’y dérober, ce serait en réalité précisément le contraire.

« La musique, dit M. Ducondut, procède par phrases, qui se composent de mesures égales entre elles et