Page:Berlioz - Les Grotesques de la musique, 1859.djvu/54

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Chimborazo, par exemple, et si, par l’un des procédés dont on dispose aujourd’hui, on y mettait le feu, qu’arriverait-il ? Croyez-vous que l’explosion pût avoir lieu, et que sa force fût capable de briser, de faire sauter une masse aussi extraordinairement résistante par sa densité, par sa cohésion et par son poids ? »… L’amateur de chimie, embarrassé, réfléchit un instant, chose que font rarement les amateurs de musique ou de philosophie, et me répondit en hésitant : « Il est probable que la puissance de la poudre serait insuffisante, que son inflammation ayant lieu néanmoins et produisant instantanément des gaz dont l’expansion serait domptée par la résistance de la montagne, ces gaz se condenseraient en un liquide, toujours disposé à reprendre une forme gazeuse et à faire une épouvantable explosion le jour où la force supérieure cesserait de le comprimer. » Je ne sais jusqu’à quel point l’opinion de mon chimiste dilettante est fondée, mais peut-être cité-je à propos la proposition qui lui fut soumise.

Il y a des gens, en effet, j’en connais, qui, obligés de lutter avec une montagne d’absurdités, éprouvant au centre de leur cœur une colère incalculable, insuffisante cependant pour faire sauter la montagne, prennent feu tout d’abord, et presque aussitôt se soumettant sans bruit, en souriant même, à la loi de la déraison, voient les foudres de leur volcan se liquéfier jusqu’à nouvel ordre.

Les liquides, ainsi produits, sont ordinairement noirs et d’une extrême amertume ; il y en a pourtant d’in-