Page:Berlioz - Mémoires, 1870.djvu/87

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bonheur. C’était une invocation au sommeil. Mais le trio avec chœur, pitoyablement chanté, le fut en outre sans chœur ; les choristes ayant manqué leur entrée, se turent prudemment jusqu’à la fin. La scène grecque, dont le style exigeait de grandes masses vocales, laissa le public assez froid.

Elle n’a jamais été exécutée depuis lors et j’ai fini par la détruire.

En somme pourtant, ce concert me fut d’une utilité réelle ; d’abord en me faisant connaître des artistes et du public ; ce qui, malgré l’avis de Cherubini, commençait à devenir nécessaire ; puis en me mettant aux prises avec les nombreuses difficultés que présente la carrière du compositeur, quand il veut organiser lui-même l’exécution de ses œuvres. Je vis par cette épreuve combien il me restait à faire pour les surmonter entièrement. Inutile d’ajouter que la recette fut à peine suffisante pour payer l’éclairage, les affiches, le droit des pauvres, et mes impayables choristes qui avaient su se taire si bien.

Plusieurs journaux louèrent chaudement ce concert. Fétis (qui depuis...) Fétis lui-même, dans un salon, s’exprima à mon sujet en termes extrêmement flatteurs et annonça mon entrée dans la carrière comme un véritable événement.

Mais cette rumeur fut-elle suffisante pour attirer l’attention de miss Smithson, au milieu de l’enivrement que devaient lui causer ses triomphes ?... Hélas ! j’ai su ensuite que tout entière à sa brillante tâche, de mon concert, de mon succès, de mes efforts, et de moi-même, elle n’avait pas seulement entendu parler.....


XX


Apparition de Beethoven au Conservatoire. — Réserve haineuse des maîtres français. — Impression produite par la symphonie en ut mineur sur Lesueur. — Persistance de celui-ci dans son opinion systématique.


Les coups de tonnerre se succèdent quelquefois dans la vie de l’artiste, aussi rapidement que dans ces grandes tempêtes, où les nues gorgées de fluide électrique semblent se renvoyer la foudre et souffler l’ouragan.