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de l’idée à priori et du doute.

§ VIII. — De la preuve et de la contre-épreuve.

Nous avons dit plus haut qu’un expérimentateur qui voit son idée confirmée par une expérience, doit douter encore et demander une contre-épreuve.

En effet, pour conclure avec certitude qu’une condition donnée est la cause prochaine d’un phénomène, il ne suffit pas d’avoir prouvé que cette condition précède ou accompagne toujours le phénomène ; mais il faut encore établir que, cette condition étant supprimée, le phénomène ne se montrera plus. Si l’on se bornait à la seule preuve de présence, on pourrait à chaque instant tomber dans l’erreur et croire à des relations de cause à effet quand il n’y a que simple coïncidence. Les coïncidences constituent, ainsi que nous le verrons plus loin, un des écueils les plus graves que rencontre la méthode expérimentale dans les sciences complexes comme la biologie. C’est le post hoc, ergo propter hoc des médecins auquel on peut se laisser très facilement entraîner, surtout si le résultat de l’expérience ou de l’observation favorise une idée préconçue.

La contre-épreuve devient donc le caractère essentiel et nécessaire de la conclusion du raisonnement expérimental. Elle est l’expression du doute philosophique porté aussi loin que possible. C’est la contre-épreuve qui juge si la relation de cause à effet que l’on cherche dans les phénomènes est trouvée. Pour cela, elle supprime la cause admise pour voir si l’effet persiste, s’appuyant sur cet adage ancien et absolument vrai : Sublata