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de l’expérimentation chez les êtres vivants.

le droit de faire des expériences et des vivisections sur les animaux ? Quant à moi, je pense qu’on a ce droit d’une manière entière et absolue. Il serait bien étrange, en effet, qu’on reconnût que l’homme a le droit de se servir des animaux pour tous les usages de la vie, pour ses services domestiques, pour son alimentation, et qu’on lui défendît de s’en servir pour s’instruire dans une des sciences les plus utiles à l’humanité. Il n’y a pas à hésiter ; la science de la vie ne peut se constituer que par des expériences, et l’on ne peut sauver de la mort des êtres vivants qu’après en avoir sacrifié d’autres. Il faut faire les expériences sur les hommes ou sur les animaux. Or, je trouve que les médecins font déjà trop d’expériences dangereuses sur les hommes avant de les avoir étudiées soigneusement sur les animaux. Je n’admets pas qu’il soit moral d’essayer sur les malades dans les hôpitaux des remèdes plus ou moins dangereux ou actifs, sans qu’on les ait préalablement expérimentés sur des chiens ; car je prouverai plus loin que tout ce que l’on obtient chez les animaux peut parfaitement être concluant pour l’homme quand on sait bien expérimenter. Donc, s’il est immoral de faire sur un homme une expérience dès qu’elle est dangereuse pour lui, quoique le résultat puisse être utile aux autres, il est essentiellement moral de faire sur un animal des expériences, quoique douloureuses et dangereuses pour lui, dès qu’elles peuvent être utiles pour l’homme.

Après tout cela, faudra-t-il se laisser émouvoir par les cris de sensibilité qu’ont pu pousser les gens du monde ou par les objections qu’ont pu faire les hommes