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considérations spéciales aux êtres vivants.

tionner les textes avec plus ou moins d’exactitude, mais cela n’aurait pas résolu la question scientifique. Il fallait donc disséquer et perfectionner les moyens de dissection pour mieux suivre les anastomoses nerveuses, et collationner sur la nature la description de chaque anatomiste : c’est ce que je fis, et je trouvai que la divergence des auteurs venait de ce qu’ils n’avaient pas assigné aux deux nerfs les mêmes délimitations. Dès lors c’est l’anatomie, poussée plus loin, qui a pu expliquer les dissidences anatomiques. Je n’admets donc pas qu’il puisse y avoir dans les sciences des hommes qui fassent leur spécialité de la critique, comme il y en a dans les lettres et dans les arts. La critique dans chaque science, pour être vraiment utile, doit être faite par les savants eux-mêmes et par les maîtres les plus éminents.

Une autre erreur assez fréquente est celle qui consiste à confondre l’histoire des hommes avec l’histoire d’une science. L’évolution logique et didactique d’une science expérimentale n’est pas du tout représentée par l’histoire chronologique des hommes qui s’en sont occupés. Toutefois il faut excepter les sciences mathématiques et astronomiques, mais cela ne saurait exister pour les sciences expérimentales physico-chimiques et pour la médecine en particulier. La médecine est née du besoin, a dit Baglivi, c’est-à-dire que, dès qu’il a existé un malade, on lui a porté secours et l’on a cherché à le guérir. La médecine s’est donc trouvée à son berceau une science appliquée mêlée à la religion et aux sentiments de commisération que les hommes éprouvent les uns pour les autres. Mais la médecine