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considérations spéciales aux êtres vivants.

pital et les livres lui suffisent. C’est là une erreur ; la connaissance clinique ne suffit pas plus au médecin que la connaissance des minéraux ne suffirait au chimiste ou au physicien. Il faut que le physiologiste médecin analyse expérimentalement les phénomènes de la matière vivante, comme le physicien et le chimiste analysent expérimentalement les phénomènes de la matière brute. Le laboratoire est donc la condition sine qua non du développement de la médecine expérimentale, comme il l’a été pour toutes les autres sciences physico-chimiques. Sans cela l’expérimentateur et la science expérimentale ne sauraient exister.

Je ne m’étendrai pas plus longtemps sur un sujet aussi important et qu’il serait impossible de développer ici suffisamment ; je terminerai en disant qu’il est une vérité bien établie dans la science moderne, c’est que les cours scientifiques ne peuvent que faire naître le goût des sciences et leur servir d’introduction. Le professeur, en indiquant dans une chaire didactique les résultats acquis d’une science ainsi que sa méthode, forme l’esprit de ses auditeurs, les rend aptes à apprendre et à choisir leur direction, mais il ne saurait jamais prétendre en faire des savants. C’est dans le laboratoire que se trouve la pépinière réelle du vrai savant expérimentateur c’est-à-dire de celui qui crée la science que d’autres pourront ensuite vulgariser. Or, si l’on veut avoir beaucoup de fruits, la première chose est de soigner les pépinières des arbres à fruits. L’évidence de cette vérité tend à amener et amènera nécessairement une réforme universelle et profonde dans