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du raisonnement expérimental.

jactance ; l’expérimentateur, au contraire, fait acte d’humilité en niant l’autorité personnelle, car il doute aussi de ses propres connaissances, et il soumet l’autorité des hommes à celle de l’expérience et des lois de la nature.

La physique et la chimie étant des sciences constituées, nous présentent cette indépendance et cette impersonnalité que réclame la méthode expérimentale. Mais la médecine est encore dans les ténèbres de l’empirisme, et elle subit les conséquences de son état arriéré. On la voit encore plus ou moins mêlée à la religion et au surnaturel. Le merveilleux et la superstition y jouent un grand rôle. Les sorciers, les somnambules, les guérisseurs en vertu d’un don du ciel, sont écoutés à l’égal des médecins. La personnalité médicale est placée au-dessus de la science par les médecins eux-mêmes, ils cherchent leurs autorités dans la tradition, dans les doctrines, ou dans le tact médical. Cet état de choses est la preuve la plus claire que la méthode expérimentale n’est point encore arrivée dans la médecine.

La méthode expérimentale, méthode du libre penseur, ne cherche que la vérité scientifique. Le sentiment, d’où tout émane, doit conserver sa spontanéité entière et toute sa liberté pour la manifestation des idées expérimentales ; la raison doit, elle aussi, conserver la liberté de douter, et par cela elle s’impose de soumettre toujours l’idée au contrôle de l’expérience. De même que dans les autres actes humains, le sentiment détermine à agir en manifestant l’idée qui donne le motif de l’action, de même dans la méthode expérimentale, c’est