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lui avait annoncé et décrit, il avait devant lui un être très frêle, à la voix douce.

Le quatrième acte fut acclamé. La révolte d’Adrienne contre la princesse de Bouillon souleva la salle.

Et enfin le cinquième acte, dans lequel la malheureuse artiste agonise, empoisonnée par sa rivale, donna lieu à une manifestation pleine d’émotion. Après le troisième acte, il paraît que les jeunes gens furent envoyés par les dames pour réquisitionner tout ce qu’il y avait de musiciens libres. Et quelles ne furent pas ma surprise et ma joie en arrivant à l’hôtel : une admirable sérénade me fut donnée pendant mon souper.

La foule s’était amassée sous les fenêtres d’Albemarle Hôtel. Et je dus sortir plusieurs fois sur le balcon pour saluer et remercier le public, qu’on m’avait annoncé comme froid en général, et comme très prévenu contre moi en particulier.

Aussi je remerciai du fond de mon cœur tous mes détracteurs et calomniateurs qui me donnaient la joie de combattre avec la certitude de vaincre. La victoire était plus belle que je n’avais osé l’espérer.

Je donnai à New-York vingt-sept représentations. Les spectacles furent : Adrienne Lecouvreur, Froufrou, Hernani, La Dame aux Camélias, Phèdre, Le Sphinx, L’Étrangère. La moyenne des recettes fut de vingt mille trois cent quarante-deux francs par représentation, matinées comprises.

La dernière représentation fut donnée le samedi 4 décembre en matinée, car ma compagnie partait le soir même pour Boston. Et je m’étais réservé cette soirée pour rendre visite à Edison, à Menlo Park, où m’attendait la plus féerique réception.

Oh ! cette matinée du samedi 4 décembre, je ne puis